mercredi 7 août 2019

Jacinthe et Le Nénuphar

Jacinthe habite à Sainte-Anne, une petite ville située à 40 km à l'est de Winnipeg. Elle a créé un magazine Web qu'elle a baptisé Le Nénuphar. Je le trouve beau, ce magazine! Pourquoi l'avoir nommé « Le Nénuphar » ? Explorez-le, vous découvrirez ! Mieux encore: abonnez-vous ! Une petite mine d'or à chaque mois, dans votre boite de réception courriel, et ce, gratuitement. Imaginez! Et par surcroît, vous encouragerez des gens qui travaillent pour la vitalté de la francophonie en situation de minorité.

https://www.magazinelenenuphar.com/

Jacinthe devant ses écrans ou devrais-je dire...ses étangs ! C'est ici que Le Nénuphar prend vie.

Jacinthe et moi avions communiqué il y a de cela quelques semaines, au sujet du Nénuphar bien entendu. Un secret pas du tout bien gardé: l'idée était d'explorer la possibilité d'une collaboration (chut! ce n'est pas parce qu'il est question du Nénuphar que nous allons tolérer le grenouillage!). Au moment de mon aller vers l'Ouest, Jacinthe était au Québec. « J'arrêterai au retour », lui avais-je promis. Me voilà!

Martini, vin, bière japonaise (Kirin Ichiban: excellente, soit dit en passant), délicieux souper, dodo dans un bon lit et deux brassées de lavage! Allons-y pour l'essentiel maintenant: des personnes uniques avec qui j'ai vécu un moment des plus agréables !

Jacinthe et son conjoint Yuki ont deux enfants, France et Vincent. France vit en appartement à Winnipeg, Vincent habite chez ses parents. Ces deux jeunes adultes sont des judokas de haut niveau. Ils ont étudié au Japon et y ont perfectionné leur judo avec de grands maitres. Ils sont trilingues, évidemment.
Jacinthe, Yuki et Vincent
Yuki, leur père, est aussi trilingue, et son français, pourtant troisième langue acquise, est absolument impeccable. L'une de ses réflexions à propos de son apprentissage du français m'a charmé au plus haut point. Il disait essentiellement ceci: « on ne peut comprendre et aimer une langue que si on peut saisir la culture qu'elle porte. Moi, c'est en écoutant Brel, Brassens, Aznavour que j'ai saisi l'essence de cette langue ». Voilà l'enjeu: la connaissance d'une langue passe par la connaissance de ses référents culturels. Opinion que partage Jacinthe. C'est d'ailleurs la première chose qu'elle m'a dite au sujet de l'intention qui l'anime lorsqu'elle crée le contenu du Nénuphar : fournir des référents. Elle me fait remarquer qu'un bon nombre de jeunes issus de la francophonie en situation de minorité, ne possédant pas ces référents culturels, ont de la difficulté à saisir les métaphores, les jeux de mots, la pensée symbolique. Elle a donc conçu des exercices pour aider les jeunes à acquérir cette capacité (vous les trouverez dans la section « Langue française »). Certains professeurs ont commencé à utiliser ces contenus comme outil pédagogique. Jacinthe espère que l'idée se répandra. De fait, je l'ai souvent dit dans ce blogue, une langue, c'est pas qu'un simple moyen de communication. Une langue, ça exprime et ça évoque. C'est souvent dans ce qu'elle évoque que se logent sa grandeur et sa beauté.

Vincent s'exprime à son tour. Pour lui, la langue française, qu'il maitrise très bien d'ailleurs, a le défaut de contenir trop d'exceptions, ce qui la rend inutilement complexe. À plusieurs égards, son point de vue se rapprochait de celui de la linguiste Maria Candea, que j'ai cité dans l'article du 31 juillet dernier (Les francophones de Nanaimo). Propos que j'ai souvent entendus chez les plus jeunes. L'argument: de nos jours, il y a tant à faire, tant à expérimenter, tant à vivre, pourquoi passer autant de temps à étudier les subtilités d'une langue qui n'ont aucune valeur ajoutée. Cette réflexion me ramène tout droit à ce beau passage du livre Les Barbares, essai sur la mutation, où l'auteur, Alessandro Barrico, dit ceci à propos de notre époque : « [...] ainsi s'est imposée l'idée que l'intensité du monde ne vient pas du sous-sol des choses, mais de la lumière d'une séquence dessinée à la hâte sur la surface de l'existant ». Le monde change ! Cela dit, ce qui m'importait le plus lors de cette soirée, c'est que le débat pouvait se tenir et qu'il se tenait avec rigueur et respect.

Ah ! mais quelle belle soirée j'ai passée en compagnie de cette petite famille aux esprits bouillonnants. Dans cette maison les mots ne manquent pas...

Merci pour votre accueil chaleureux.









3 commentaires:

  1. Merci de ce bel article, Guy! Ce fut un réel de partager ces bons moments avec toi et ton esprit vif et curieux, avide de vraiment bien saisir la situation des francophones en situation minoritaire.

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  2. * ... un réel PLAISIR, bien sûr!

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  3. Vous avez apporté de nouvelles réponses à mes interrogations, je vous en remercie. Merci aussi pour l'accueil au sein de votre famille. Geste généreux que j'ai beaucoup apprécié.

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